2.11.11

René CAUSSANEL et Lucian Freud, 4 novembre 2011

Double éclairage sur le travail de René Caussanel :

D'abord ses gouaches sur papier. Très grandes.
Mesurant 260 cm sur 400, elles ne peuvent pas rentrer dans Le Hublot. Le blog en accueille donc quelques unes.

Ensuite ses dessins d'après certains peintres. Très petits.
L'artiste et Stéphane André ont complaisamment prêté au Hublot un ensemble de dessins en couleurs d'après Lucian Freud(*).

Deux techniques, deux formats, deux styles... Un même artiste.

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(*)Certains d'entre eux ne correspondant pas au public familial de la place Voltaire, ils seront décrochés à l'issue de l'apéro-rencontre du vendredi. C'est pourquoi la totalité de cet ensemble fait l'objet d'un album consultable dans la Bibliothèque du Hublot :

 Quant à l'accrochage définitif, retrouvez le dans Hublots du soir.

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René Caussanel installant dans l'atelier "Peinture n° 10 (bonne nuit)",
mai 2008, gouache sur papier, 260 x 400 cm
(photographie Nelly Blaya)
Quelques Vues d'alors et des extraits d'un abécédaire...
[C]
Corps
"Les corps sont le présent, c’est ce qui donne une substance au reste. Tous les autres motifs n’auraient eu ni de chair, ni d’impulsion, sans les corps. Ce sont eux qui impliquent le mouvement. Couleur Il est très rare que je trouve instantanément la couleur que je souhaite. Les idées que j’ai de la couleur sont souvent impossibles : un jaune très foncé, un rouge très vert, mais par les superpositions - un noir sur un jaune par exemple - il m’arrive de saisir ce que je cherche, il y a toujours une transparence qui donne une nuance qui n’est ni l’une ni l’autre. Lorsqu’on me dit que je peins des silhouettes bicolores, je m’étonne car j’ai l’impression de faire des choses multicolores et tout en relief! Dans chaque peinture, il y a au moins une douzaine de pigments utilisés. Les teintes qui ne figurent pas sur la toile, ne sont pas exclues pour autant. J’ai l’impression, qu’au contraire, elles y sont toutes contenues, toujours."

Peinture n° 34 (parfum), oct. 2008, gouache sur papier, 260 x 400 cm
[E]
Enfance
"Les premières esquisses que j’ai réalisées, à quatre ans et demi, sont des dessins d’observation d’après des petits animaux en plastique que je possédais. Par la suite, j’ai essentiellement, et pendant des années, dessiné des animaux. C’était mon sujet de prédilection. À 10-11 ans, mes parents m’ont offert un livre d’art sur l’histoire de la peinture des origines à nos jours. J’ai tout de suite été fasciné par les quelques reproductions d’art préhistorique qu’il contenait. J’y retrouvais un idéal de peinture, étrangement actuel et direct qui m’a beaucoup ému."
Épuisement
"L’œuvre en cours s’arrête toujours par épuisement. Il y a eu un épuisement. C’est ça, il faut aller jusqu’à l’épuisement, mais sans passer à l’acharnement. L’acharnement ne produit rien. L’obstination c’est différent. Je suis assez obstiné."
Excès
"Je suis assez excessif quand je travaille car je pense que l’on apprend toujours quelque chose dans les limites."
Peinture n° 19 (corail), juill. 2008, gouache sur papier, 260 x 400 cm

[M]
Mémoire
"Concernant les dessins, qui datent de mon enfance, c’est comme si je les avais réalisés hier. Quand je les regarde, je retrouve exactement les sensations que je ressentais en les esquissant. Quand j’observe le dessin, c’est comme si j’étais devant le sujet lui-même. Si le trait est juste, il suffit de le contempler pour tout retrouver, tel un microfilm qui contiendrait toutes les données."
Monomaniaque
"Je suis plutôt monomaniaque dans mon rapport à la peinture, et pourtant, je suis également curieux d’absolument tout. Le regard encyclopédique m’a toujours fasciné et a guidé ma recherche autour de la couleur et des motifs pour cette série. J’aurais aimé pouvoir aller encore plus loin, mais je me suis cantonné à ce que j’avais vu ou fréquenté et qui m’avait déjà préoccupé..."

Peinture n° 58 (goldfish), mars 2009, gouache sur papier, 260 x 400 cm

[P]
Proust
"Je ne me rappelle plus exactement dans quel ordre cela s’est déroulé. Toujours est-il qu’à cette époque, j’ai commencé à relire  À la recherche du temps perdu  de Proust, ainsi que d’autres de ses ouvrages. Cela m’a accompagné en filigrane pendant tout ce travail, avec le sentiment étrange, comme Proust, de n’avoir encore rien fait, à plus de 50 ans, d’avoir tout raté. C’était mon sentiment dominant. Chaque fois que j’entreprenais un travail, j’étais profondément insatisfait. D’autre part, cette recherche m’a permis de tout reprendre. J’ai même repris d’anciennes peintures, certaines que j’avais détruites, pour les recréer différemment. Il y a certainement un peu de cette idée Proustienne, du remodelage du passé, tout en tenant compte du présent."

Peinture n° 33 (Costanza), oct. 2008, gouache sur papier, 260 x 400 cm
[R]
Ressemblance
"J’ai toujours l’impression, même quand je fais des zèbres qui ne ressemblent pas du tout à des zèbres mais plutôt à des espèces de loups en fil de fer, de faire des choses très réalistes. Pour moi, ce que je fais est toujours ressemblant. La ressemblance a toujours été quelque chose d’essentiel à mes yeux (1). D’ailleurs, ce qui me plaît dans la peinture c’est ce que je trouve ressemblant, même si je peux trouver un Mondrian très ressemblant ! Cette notion dépasse l’aspect purement photographique. Comment définir la ressemblance ?"


Vues de l'exposition "René Caussanel - Peintures", oct./déc. 2010
Éric Linard Éditions
[V]
Vibration
"J’ai l’impression de n’avoir aucun rapport avec la couleur sans la lumière naturelle, ça ne vibre pas, il n’y a pas de contact."
Extraits d'un abécédaire d'après un entretien de Martine Michard avec René Caussanel
à l'occasion de l'exposition "René Caussanel, Peintures 2008-2009, Soixante-cinq vues d'alors",
Maison des arts Georges Pompidou, Cajarc, avril-juin 2010

(1)- Voir, à ce propos, l'autoportrait de R. C. dans la rubrique "Qui c'est qui..."